L'obligation d'information des salariés en cas de cession du fonds de commerce ou de la majorité du capital d'une entreprise après la Loi n°2015-990 du 6 août 2015, dite "Loi MACRON"

Publié le : 23/08/2016 23 août août 08 2016

Lors d'une précédente note d'actualité, un point avait été fait sur l'obligation de notification préalable du projet de cession du Cédant au profit des salariés dans le cas de cession d'un fonds de commerce (L 141-23 et suivant du Code de commerce) ou en cas de cession de la majorité des titres de la société (L 23-10-1 et suivant du Code de commerce), instituée par la loi du 31 juillet 2014 n° 2014-856 relative à l’économie sociale et solidaire, publiée au JO du 01/08/2014[1].

La Loi "Macron" modifie sensiblement le régime de ce droit d'information des salariés en limitant le champ des opérations concernées et en révisant les sanctions prévues par les textes.

Attention cependant, les nouvelles dispositions exposées dans la présente note d'actualité, prévues à l'article 204 de la loi Macron du 6 août 2015, ne sont pas en  vigueur à ce jour dans l'attente d'un décret à publier.

Ce décret est d'autant plus souhaitable que des questions demeurent quant au régime des sanctions applicables.


I - Les opérations concernées – champ d'application

La loi Macron réduit sensiblement les opérations pour lesquelles le droit d'information s'applique, par de légères retouches sémantiques : à l'heure actuelle, ce droit d'information s'applique à toutes les cessions, ce qui inclut par exemple les donations, apports de titre ou de fonds de commerce…

Dès l'entrée en vigueur du nouveau texte, seules les ventes proprement dites seront concernées.

La loi prévoit également une nouvelle hypothèse d'exclusion du droit d'information des salariés : si, au cours des douze mois précédant la vente, celle-ci a déjà fait l'objet d'une information des salariés dans le cadre de l’information triennale prévue par l'article 18 de la LOI n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire[2].


II - Formalisme

La loi Macron précise que lorsque l’information du salarié est faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, "la date de réception de l’information est la date de la première présentation de la lettre" (modification des articles L 141-25, L 141-30, L 23-10-3 et L 23-10-9 du Code de Commerce).

En outre à l'heure actuelle, en cas de propriétaire cédant distinct du représentant légal de l'entreprise ou de l'exploitant du fonds, les textes imposent au représentant légal ou exploitant de procéder à l'information des salariés, tout en indiquant que les offres d'achat peuvent être présentées par les salariés au propriétaire cédant.

Dès l'entrée en vigueur du nouveau texte, les salariés présenteront leur offre à l’exploitant du fonds ou au représentant légal de l'entreprise, à charge pour ces derniers de la transmettre sans délai au propriétaire cédant (modification des articles L 141-23, L 141-28, L 23-10-1 et L 23-10-7 du Code de Commerce).


 III - Sanction du non respect du droit d'information des salariés

Une décision du Conseil Constitutionnel du 17 juillet 2015 (décision n° 2015-476 QPC du 17 juillet 2015 a déclaré inconstitutionnelles les sanctions prévues par les articles L23-10-1 et L23-10-7 créés par la loi du 31 juillet 2014 précitée.

Ces articles prévoyaient en effet, en cas de non respect du droit d'information des salariés :

"La cession intervenue en méconnaissance du présent article peut être annulée à la demande de tout salarié.

L'action en nullité se prescrit par deux mois à compter de la date de publication de la cession de la participation ou de la date à laquelle tous les salariés en ont été informés
".

A noter que cette déclaration d'inconstitutionnalité ne vise que les dispositions du Code de Commerce relatives aux cessions de parts sociales, actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d'une société.

Cependant, des sanctions similaires étant prévues par les articles L141-23 et L141-25 du Code de Commerce concernant respectivement les cessions de fonds de commerce des entreprises employant moins de cinquante salariés et de celles employant de cinquante à deux cent quarante neuf salariés, la doctrine s'accorde pour considérer que la déclaration d'inconstitutionnalité est transposable aux sanctions prévues en cas de cessions de fonds de commerce eu égard aux motifs invoqués par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 17 juillet 2015.

Il en résulte que depuis le 19 juillet 2015, date d'effet de l'abrogation des dispositions déclarées inconstitutionnelles, le commun des justiciables est dans l'expectative concernant les sanctions applicables au non respect de l'obligation d'information préalable des salariés en cas de cession de la majorité du capital d'une entreprise ou de son fonds de commerce.

Bien sûr, il est toujours possible de recourir aux mécanismes de droit commun de la responsabilité pour réclamer des dommages et intérêts en cas de faute, laissés à la libre appréciation du juge, mais dans cette hypothèse un dommage doit être établi et quantifié.

La loi MACRON du 6 août 2015 tente de combler ce vide juridique puisque de nouvelles sanctions sont prévues à son article 204.

Les alinéas litigieux des articles L23-10-1, L23-10-7, L.141-23 et L.141-25 du Code de Commerce sont ainsi remplacés par les dispositions suivantes :

« Lorsqu'une action en responsabilité est engagée, la juridiction saisie peut, à la demande du ministère public, prononcer une amende civile dont le montant ne peut excéder 2 % du montant de la vente. »

Ces dispositions soulèvent cependant plus de questions qu'elles n'en résolvent, puisqu'elles abrogent par la même occasion les dispositions qui :

- réservaient l'action aux salariés,

- instauraient un délai de prescription de l'action de deux mois à compter de la date de publication de la cession de la participation ou de la date à laquelle tous les salariés en ont été informés ou de la date de publication de l'avis de cession du fonds.



[1]CF. "NOTE SUR LES ARTICLES 19 ET 20 DE LA LOI DU 31 JUILLET 2014"

[2]Le mécanisme de l'information triennale des salariés doit cependant lui-même faire l'objet d'un décret d'application qui déterminera le contenu et les modalités de cette information suivant la taille de l'entreprise.

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