Document d’information pré contractuelle (DIP) et son importance fondamentale dans les relations contractuelles avec des groupements d’achat.

Publié le : 08/04/2024 08 avril avr. 04 2024

Une récente jurisprudence, concernant des opticiens franchisés, pourrait-elle, être utilisée par des pharmaciens vis-à-vis de groupement d’achat avec enseigne et contenant des perspectives de chiffre d’affaires et ou de rentabilité, notamment quand ces contrats, souscrits avec le groupement, sont accompagnés de contrat d’obligation convertible en action (OCA)?

En matière d’opticien franchisé, des demandes en nullité de trois contrats de concession formulées en raison de la transmission, à l’intérieur du DIP, d’une étude provisionnelle erronée, ont été rejetées en raison de l’expérience du dirigeant des concessionnaires. Si cette expérience professionnelle de l’opticien n’avait pas été retenue, les demandes en nullité auraient pu être accueillies certaines conditions.
Le Cour d’appel de Toulouse, le 8 novembre 2023, a débouté les demandes formées par trois concessionnaires relatives à la nullité des contrats de concession, signés avec le concédant en raison d’un manquement présumé du concédant à son obligation d’information précontractuelle.  

Les trois concessionnaires, trois sociétés à responsabilité limitée à associé unique, avaient le même dirigeant et exploitant des magasins d’optique. 
Leur position consistait à soutenir que leur consentement au contrat avait été vicié en raison d’une erreur sur les comptes prévisionnels, soit « la rentabilité de l’affaire », présente dans le document d’information précontractuel (DIP) remis par le concédant en exécution des articles L.330-3 et R.330-3 codifiés au Code de commerce.  

Les concessionnaires estimaient que leur cocontractant leur avait transmis des chiffres dénués de sérieux, chiffres à partir desquels ils ont établi une étude prévisionnelle trop optimiste.  

La Cour d’appel de Toulouse a débouté les concessionnaires de leur demande en se fondant sur deux motifs.  

Premièrement, la Cour d’appel de Toulouse considère que la compétence et l’expérience du gérant des sociétés concessionnaires, lequel « gérait deux magasins d’optique, dont l’un depuis plus de 10 ans », « dans ce même secteur, dans la même zone géographique et dans le même cadre d’un contrat d’adhésion à une franchise » auraient dû lui permettre « de se faire une représentation réaliste du potentiel de l’activité ». La Cour d’appel de Toulouse a considéré de plus, que « tout chiffre d’affaires prévisible contient en lui-même une part d’aléa que doit intégrer celui qui se dit victime d’une manœuvre dolosive pour établir l’erreur sur les montants de chiffres d’affaires qu’il dénonce ». Ainsi, la portée d’un dol doit être analysée, en fonction du devoir de la victime de se renseigner et de ses propres aptitudes, compétences et expériences.  



Deuxièmement, la Cour d’appel de Toulouse exclut le caractère déterminant de l’erreur des concessionnaires sur la rentabilité du commerce. 
La Cour d’appel précise, par l’analyse du contrat signé, que celle-ci n’était pas entrée dans le champ contractuel et que le concédant n’avait pas su « que cette information était déterminante du consentement pour son partenaire ».  Tel était ainsi rédigé le contrat.

La Cour d’appel de Toulouse rappelle que : « si la rentabilité d’un commerce est un élément important dans le choix du repreneur de l’acquérir, l’erreur sur les possibilités de rentabilité ne peut emporter vice du consentement et nullité du contrat qu’à la condition que cet élément soit entré dans le champ contractuel liant les deux parties et notamment que le cocontractant à qui la manœuvre est reprochée ait su que cette information était déterminante du consentement pour son partenaire ».  

Or les trois concessionnaires n’ont pas rapporté la preuve que la question de la rentabilité et « plus encore » la question « de la possibilité […] d’atteindre voir de dépasser les chiffres d’affaires communiqués soit bien entré dans le champ contractuel » et que le concédant « ait bien su que ceux-ci étaient un élément déterminant de son choix ». La Cour d’appel de Toulouse précise qu’en l’absence de preuve rapportée par les concessionnaires d’une garantie faite par le concédant de pouvoir atteindre ou dépasser les chiffres d’affaires communiqués, il avait été accepté par les concessionnaires, « l’existence d’une incertitude quant à la possibilité pour une société débutante de pouvoir atteindre ce potentiel ».  

Ce raisonnement de la Cour d’appel de Toulouse, fonda sa décision du 8 novembre 2023 qui a confirmé la décision de première instance rejetant les demandes formulées par les professionnels de « voir prononcer la nullité pour dol des contrats d’adhésion à la concession de marque ».  

La décision de la Cour d’appel questionne sur le caractère excusable de l’erreur provoquée par le dol et sur l’interprétation de celui-ci.  

(Cour d’appel de Toulouse, 8 novembre 2023, 22/00296



Dans le monde de la pharmacie, très souvent nombre de contrats d’adhésion à des groupements d’achat avec enseigne sont signés par des pharmaciens en première installation donc totalement inexpérimentés ou par des pharmaciens très peu expérimentés. 
Certains de ces contrats sont prometteurs d’objectifs de chiffre d’affaires et ou de rentabilité et sont parfois doublés de financement obligataire pour acquérir l’officine de pharmacie. 
Dans ces cas une contestation du document d’information précontractuel pourrait donc sérieusement s’envisager.


 

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